Il a mouillé la tunique du Syli au prix de son âme durant toute sa carrière de footballeur. Et sans répit, aujourd’hui, dans son manteau d’ancien joueur, Kamil Zayatte tente tant bien que mal à contribuer au développement de notre football à travers des projets. Cela ne se passe pas sans obstacles. Dans un réceptif hôtelier à Ratoma, l’ex joueur de Lens, des Young Boys, Hull City dit tout à ConakrySports.
Entretien…
Cela fait un bail qu’on ne vous voit pas, qu’est ce que vous êtes devenu ?
K.Z: Je suis là. Je profite de ma famille entre deux pays notamment l’Angleterre et la Guinée. Vous savez qu’en activité on a du mal à passer du temps avec sa famille. On est entre deux avions ou entre les bus à aller jouer des matches partout. J’en profite après ma carrière.
Quel regard avez-vous de l’arrêt des activités sportives en raison de l’expansion de la pandémie Covid-19 ?
K.Z: Je suis peiné avant tout. C’est un manque à gagner pour tout le monde quand ça ne joue pas au football. Économiquement, cet arrêt plombe les clubs qui ont investi sur les joueurs. J’ai vu dans les championnats par exemple en Espagne, les joueurs perdre 70 % de leur salaire et en Angleterre on parle de 30%. Indirectement, il y a une répercussion sur tous les secteurs autour du football.
Avez-vous vécu un moment pareil dans votre carrière où vous avez été éloigné des terrains pendant longtemps ?
K.Z: Mis à part les blessures, je n’ai jamais été contraint de s’éloigner des terrains. Personne n’a encore vécu un tel événement. À ce que je sache, c’est une première. Il y a des championnats qui s’arrêtent pour un mois, deux mois, pas plus et pour des raisons autres que celle-ci. Maintenant, on va vers l’inattendu parce qu’on ne sait exactement ce qui nous attend. Ça craint.
À cause de cette pandémie la CAF (Confédération africaine de football) a suspendu les éliminatoires de la CAN 2021 alors que la Guinée était sur une très bonne lancée. Cet arrêt peut-il être un handicap pour le syli ?
K.Z : Non, pas du tout. Toutefois, ce sera bénéfique pour le staff technique du Syli de refaire sa liste qui avait une cascade de blessés à l’image d’Amadou Diawara et autres. Cette liste avait suscité beaucoup de critiques parce qu’il y avait énormément d’incohérences par rapport à la performance des joueurs. J’espère qu’après la crise qu’on retrouvera des joueurs qui seront aptes.
On ose croire que vous avez un bon rapport avec Didier Six en tant qu’ancien capitaine du Syli ?
K.Z : Non. On s’est croisé à plusieurs reprises mais je n’ai pas de rapport particulier avec lui. Je n’ai pas son numéro. Par contre, je parle souvent avec Kaba Diawara à qui je fais passer mes messages par rapport à l’équipe nationale. Maintenant, si Je dois m’adresser à Didier Six pour le bien de la sélection nationale, je n’hésiterai pas à le faire.
Il y a eu récemment une sorte de redistribution des cartes avec les anciens joueurs. Certains ont été nommés entraîneurs dans les petites catégories et cela s’est fait sans Zayatte. Cela interpelle à savoir si vous avez de bonnes relations avec la fédération guinéenne de football ?
K.Z : Sincèrement, j’ai une bonne relation avec Antonio Souaré, le président de la fédération guinéenne de football. Il m’appelle, d’ailleurs, affectueusement mon fils. Sinon, c’est moi qui ai fait le pas vers la fédération et le ministère des sports pour leur proposer mes services en tant qu’ancien capitaine et amoureux de cette équipe nationale de Guinée.
À la base, c’était de donner un coup de main malgré que je n’ai pas de diplôme. J’ai proposé d’apprendre avec Kanfory Lappé Bangoura, Maleah Camara ou encore Abedi dans les catégories inférieures. Je croyais que je pouvais apprendre beaucoup de choses en côtoyant ces sélectionneurs. En vain.
Vous êtes le promoteur du tournoi international de détection. Avez-vous la satisfaction escomptée ?
K.Z : À dire vrai, le tournoi de détection n’a pas eu un franc succès. Nous en sommes à la 3e édition, mais le souci c’était l’obtention des visas pour ces jeunes à l’ambassade qui demande une garantie pour le retour au cas où ça ne marche pas. Malheureusement, on n’est pas accompagné par le ministère des Sports et la fédération guinéenne de football.
Il se susurre également que vous êtes sur un nouveau projet pour la Guinée?
K.Z : Tout à fait. Je parlais de ce projet à Fodé Mansaré, hier (samedi 4 avril). C’est la mise en place de l’association des footballeurs professionnels qui existe au Sénégal, en Côte d’ivoire et au Mali. Ce projet est une sorte de syndicat pour défendre la cause des Guinéens évoluant à l’étranger. C’est un secret de polichinelle qu’en Asie et au Maghreb nos jeunes frères sont lésés dans le traitement.
Où en êtes-vous avec ce nouveau projet ?
K.Z : J’ai déposé les dossiers au ministère des sports pour l’agrément. Visiblement, le ministre des sports refuse de nous accorder cette approbation, sous prétexte que ce sont des associations du genre qui deviendront des politiciens. Je crois qu’on ne mesure pas l’importance de ce projet. Ils peuvent être tranquilles, je n’ai aucune ambition politique.
Vous avez donc abandonné le projet ?
K.Z : Je n’abandonne pas mais ça va à la traîne. À chaque fois on me demande de relancer le dossier au niveau de Kabassan Keita. Ce dernier me dit toujours que le dossier n’est pas encore signé par le ministre. C’est frustrant. J’ai juste envie de faire comprendre une chose à qui veut l’entendre, ce n’est pas pour de l’argent que je m’engage dans ce projet. Je veux juste rendre service à la nation comme au moment où je mouillais le maillot pour ce pays en tant que footballeur.
Cette pratique devrait sans doute allonger la liste de vos regrets de votre carrière de footballeur ?
K.Z : Je n’ai pas de regret. J’ai pris du plaisir, seulement. Je voulais continuer ma carrière jusqu’à 37 ou 38 ans mais j’étais contraint d’arrêter à cause des blessures répétitives.
On ne peut pas tout peindre en noir. Dans votre carrière, il y a-t-il eu un joueur guinéen qui vous a marqué ?
K.Z : Incontestablement, c’est Pascal Feindouno. Pour moi, c’est le meilleur joueur guinéen de tous les temps. Je fais partie des millions de jeunes qu’il a fait rêver.
Pour finir, dites-nous quels sont vos plus beaux souvenirs avec le Syli ?
K.Z : J’ai trois bons souvenirs. D’abord, c’est ma toute première sélection. C’était contre l’Algérie à Conakry. Après le match retour à Alger, j’ai retrouvé mes parents à l’aéroport. Ils m’attendaient. Mes deux parents m’ont mis dans leurs bras. Ensuite, le jour ou Robert Nouzaret m’a confié le brassard de capitaine. Et enfin ma première Coupe d’Afrique des nations.
Propos recueillis par Nourdine Soumah à CONKARY